mardi 25 août 2009

Une OC= des bâtons, des bâtons

Hier, j'ai bien conscience d'avoir envoyé des ondes négatives avec mon coup de gueule contre les gens qui critiquent le secteur bancaire. Je me suis élevée contre les personnes qui ne savent pas faire la différence entre ceux qui se font exploiter et ceux qui exploitent. Les agents du réseau sont soumis à une pression commerciale sans relâche afin d'atteindre des objectifs sans cesse plus importants. Le but: faire des bâtons.
Alors je me suis interrogée sur l'origine de cette obsession. Pourquoi, moi et mes camarades nous sentons nous obligés d'en faire toujours plus?
La réponse est à trouver dans la formation de chargé de clientèle que nous avons reçue.
En me replongeant dans mes anciennes notes, je vois beaucoup de photocopies de documents sur la gestion des risques, la lutte contre le blanchiment... Mais en reprenant mes notes écrites et en rassemblant mes souvenirs, je crois que nous avons surtout étudié les méthodes commerciales pour "faire progresser le fonds de commerce" (comprenez recruter de nouveaux clients, notion fondamentale dans la banque).
De nombreux cours ont porté sur les ouvertures de compte et les opportunités commerciales. En clair, comment faire acheter au futur client le plus de services en un minimum de temps. Il s'agit de le ferrer une bonne fois pour toute car plus le client aura de produits chez nous plus il aura du mal à partir ailleurs. Ce moment est donc décisif. Il faut faire parler le client le plus possible afin qu'il nous raconte sa vie: ses passions, ses préoccupations, ses peurs, ses projets...et à partir de là lui vendre les produits qui vont avec (placements, assurances, carte de paiement, ligne de crédit revolving). À sa sortie le client ne doit (presque) plus avoir de secret pour nous. Lorsque nous devenons trop indiscrets, il n'est pas rare de voir le client se rebiffer un peu. Dans ce cas nous répondons que nous posons ces questions pour des raisons de sécurité et de gestion des risques. En fait, nos intentions sont beaucoup plus intéressées que cela.
L'objectif non écrit mais maintes fois répété en formation est de placer 5 produits minimum à chaque OC. En dessous, on a raté l'opportunité commerciale et la direction n'est pas satisfaite.
Le résultat? C'est qu'à la prochaine ouverture de compte, on place des produits qui ne sont pas appropriés au client. Par exemple, conseiller un placement sur 5 ans pour un jeune actif au SMIC ou convaincre un étudiant de placer un peu d'argent en bourse.

Le conseiller: Vous avez déjà pensé à placer un peu d'argent en bourse?

L'étudiant: Ben non, en plus j'y connais rien. Et puis j'ai d'autres trucs à penser en ce moment.

Le conseiller: Je vous comprends très bien. Mais d'une part, il n'est jamais trop tôt pour s'initier aux marchés boursiers et d'autre part, ce n'est pas vous qui achèterez les actions mais des professionnels qui connaissent très bien le marché.

L'étudiant, hésitant et un peu intimidé: Euh, ah bon? Et ça me coûterait combien?

Le conseiller: Et bien dans le cadre de notre offre pour les jeunes pas plus de 30 euros par mois sur le fonds de votre choix.

L'étudiant, il hésite toujours: Quand même, c'est pas donné.

Le conseiller, un peu agacé: Vous plaisantez? Combien dépensez vous pour votre forfait mobile et internet par mois? Vous ne savez pas? Et bien moi je vais vous le dire en moyenne entre 50 et 100 euros, et c'est de l'argent qui sort de votre poche et qui n'y rentrera plus. Alors que la bourse c'est un placement. Vous pouvez gagner de l'argent.

L'étudiant, vaincu: Euh ben oui, d'accord, alors. Qu'est ce que je dois faire?

Le conseiller, le sourire aux lèvres: Rien de plus simple. Signez là.
Italique
Le conseiller sûr de sa victoire avait déjà préparé le papier prêt à signer pour le client.
Et voilà ce qu'on appelle dans le jargon bancaire un entretien commercial bien mené.
Ca donne à réfléchir non?

Demain, je vous parlerai de la redoutable méthode commerciale des questions fermées.

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